lundi 29 janvier 2018

Petit hommage à l'arabe du Coin...

Rien de tel qu'un petit écrit du Dimanche pour rendre un petit hommage à celui à qui j'ai rendu visite quasiment chaque dimanche de mon enfance... Sans compter les visites imprévues de semaine.

J'ai grandi dans le centre ville de Lille. Il y a 30 ans les centres commerciaux intra-muros n'existaient pas encore et il fallait à l'époque sortir des villes, parcourir une quinzaine de kilomètres pour atteindre les grandes zones commerciales aux enseignes démesurées...

N'ayant pas trop les moyens, nous ne faisions nos courses à Auchan que pour les grandes occasions car même si les prix étaient légèrement moins chers (à l'époque les prix n'étaient pas cassés comme aujourd'hui dans la grande distribution) , il fallait faire la route et surtout les tentations et "écarts de liste rigoureuse" étaient bien plus nombreux... Du coup nous n'y allions que quelques fois par an : Noël, Pâques, la rentrée scolaire... Et chaque fois c'était à mes yeux une sortie exceptionnelle qui avait comme un air de fête parce que c'était l'occasion d'acheter un ou deux extras à choisir dans des rayons de friandises mesurant 10 fois la taille de ceux que nous fréquentions d'ordinaire, et puis c'était aussi l'occasion d'acheter un paquet de corn-flakes pour le petit déjeuner qui remplacerait quelques jours la tartine de beurre.

Le reste de l'année nous faisions nos courses dans les supermarchés de la ville tels que Prisunic, Miniper, Cédico et Shopi qui aujourd'hui correspondraient à peine à des "Carrefour market" voire "Carrefour city" au niveau superficie et largeur d'offre...
Ces supermarchés étaient tous fermés le dimanche et le lundi et baissaient leur rideau de fer à 19h dernier délai.
Alors quand il nous manquait quelque chose le soir ou le dimanche et lundi, nous avions tous le même réflexe : L'arabe du coin !!!

Vous savez ces petites épiceries qui mesuraient souvent moins de 20 mètres carrés et dans lesquelles, par je ne sais quel miracle, on trouvait parfois plus de produits divers et variés que dans un supermarché mesurant 10 fois sa taille.
Comme leur nom l'indique, ces superettes étaient toujours tenues par des arabes, allez savoir pourquoi... Et effectivement, toutes celles que j'aie connues étaient situées sur un coin de rue !!!
Ce qui m'échappait enfant c'était pourquoi aucune d'entre elle n'assumait sur son enseigne "L'arabe du Coin" et toutes lui préféraient le même nom sans la moindre originalité : Alimentation générale!

A la maison j'étais toujours volontaire pour aller y faire les courses, d'abord parce que je me sentais grande et importante à me promener seule dans les rues de la grande ville pour aller faire mes courses; aussi parce que souvent le dimanche la ville était particulièrement déserte et que j'adorais le contraste avec l'émulation de la veille mais surtout, surtout parce que j'étais fascinée par ces petites échoppes ou sur la même étagère la confiture pouvait cotoyer, les croquettes pour chien et les protection périodiques...

Chez l'arabe du coin, tu croisais aussi bien la mère de famille descendue en urgence de chez elle en tablier de cuisine pour dénicher la fécule de maïs qui manque à sa sauce du dimanche que le vieil ivrogne venu chercher son cubi de vin, ou devrais-je écrire de piquette parce que ses provisions pour le week-end s'avèrent insuffisantes...
Si tu y allais le soir , il y avait aussi les jeunes venus faire le plein d'alcool  avant leur soiree de fête en espérant que le commerçant etranger serait moins regardant sur leur carte d'identité que le supermarché voisin...

Et puis il y avait moi...

J'aimais arriver dans la boutique alors qu'elle était déserte et surprendre le vendeur en haut de son vieil escabeau de bois pour ranger et ajuster ses étagères jusqu'aux dernières centimètres de hauteur exploitable...




Je m'amusais à essayer de deviner la couleur des murs derrière les milliers d'articles empilés et soigneusement rangés dans une logique qui n'appartenait qu'au propriétaire des lieux.
J'adorais les parfums d'épices orientales et grimaçais en passant devant les grandes bassines remplies d'olives vertes ou noires dont raffolait pourtant mon papa...
Je m'émerveillais devant les pyramides de fruits et légumes colorés et étais toujours tentée de prendre une orange ou une pomme tout à la base pour voir ce qui se passerait...
Je m'imaginais déjà détaler en courant après l'effondrement des fruits sur le trottoir sous les cri du commerçant qui sortirait en agitant son torchon comme dans les vieux films...
Mais je ne pouvais pas faire celà car je prenais bien trop de plaisir à y revenir encore et encore.
Souvent, j'y allais pour un ou deux articles maximum car les prix étaient tout de même particulièrement chers et je souriais en constatant qu'il vendait des pâtes Cora à coté de riz Auchan, je  l'imaginais alors dévalisant le supermarché voisin aux heures de bureau pour tout réétiqueter avec 3 ou 5 francs de plus et les revendre le soir et la nuit aux étourdis du jour...

L'arabe du coin ne parlait pas très bien le Français et il n'était pas rare de l'entendre papoter avec ses clients de même origine dans leur langue natale près du comptoir sous les rubans de papier tue mouche agités par le ventilateur...
Je me souviens de son large sourire et de sa manière de me rendre ma monnaie avec cette façon qu'il avait d'avaler les "r "et les "d" genre "Méci Mamoiselle"...

Mais ce que je préférais chez l'arabe du coin, c'était son congélateur  en forme de bac, vitré sur le dessus, calé entre les sacs en papier de charbon de bois pour le barbecue, les bouteilles de bière pélican avec le bouchon à visser  et les packs d'eau vendus au prix du vin (qui lui était vendu à prix d'or!)... L'arabe du coin était le seul du quartier à vendre une de mes gourmandises estivales préférées à un prix étonnement raisonnable : Le Mister Freeze !!!

Normalement il était le seul autorisé à ouvrir son congélateur sur lequel il avait collé un papier mentionnant notre interdiction et expliquait à qui voulait l'entendre que personne ne refermait jamais bien la vitre alors que maintenant il s'en chargeait, mais il me laissait le privilège de choisir moi même le parfum de mon glaçon friandise même si il savait que ce serait toujours soit les bleus, soit ceux au coca !

Lorsque j'ai quitté la ville il y a 20 ans,  je n'ai plus retrouvé d'Arabe du coin dans mon nouveau villach'... Il y a bien eu une Alimentation générale qui a ouvert quelques temps, mais elle n'était ni sur un coin, ni tenue par un arabe mais par des asiatiques... et ils n'avaient pas l'art et la manière de rentabiliser une surface commerciale comme leurs homologues de ma jeunesse, sans doute pour tout celà qu'ils ont rapidement mis la clef sous la porte malgré nos petits achats solidaires...
Après je crois que ce sont aussi et surtout toutes ces nouvelles mini-superettes façon carrefour city, ouvertes jusque minuit  parfois, qui ont poussé ces petites enseignes chaleureuses et familiales à mettre la clef sous la porte les unes après les autres...
C'est en lisant un article dans le monde sur leur extinction  que sont remontés tous ces souvenirs bien enfouis dans ma mémoire et que j'avais envie de partager avec vous en espérant vous avoir emporté  dans une partie de ma tendre enfance.


vendredi 12 janvier 2018

Mes cheveux blancs et moi... (mais aussi un peu mes rides, mes kilos et mes vergetures)

Aujourd'hui j'avais envie d'écrire sur mes cheveux blancs et la relation que j'entretiens avec eux... mais pas qu'avec eux... J'ai envie de vous parler du jour où grâce à Facebook et à un homme qui vit à l'autre bout de la planète, je me suis réconciliée avec mes rides, mes vergetures , mes kilos et toutes mes petites imperfections... Parce que cet homme m'a ouvert les yeux, j'ai envie de partager à mon tour ma réflexion et son histoire qui changeront peut-être aussi une autre vie et alors ce message n'aura pas été vain...




Mon premier cheveu blanc a débarqué par surprise il y a 8 ans,  je m'en souviens parce que Ma grande venait de rentrer au collège quelques semaines auparavant, que les journées commençaient à raccourcir sérieusement; j'étais bien au chaud à la maison avec les enfants quand le téléphone sonna vers 18h pour entendre la directrice du collège en personne...
Je me souviens de mon sang qui n'a fait qu'un tour, me demandant quel problème allait encore me tomber dessus avec ma fille et je me souviens avoir à peu près tout imaginé sauf qu'un enfant de sa classe ait disparu et que cet enfant ait fugué parce que mon petit poussin lui avait dit qu'elle n'était pas amoureuse de lui et que lui était au désespoir !!!
Je me souviens de ma stupeur d'apprendre qu'un petit bonhomme de 10 ans ait pu être assez désespéré pour s'enfuir, de la soirée d'inquiétude et de recherches dans toute la ville par tous les parents, je me souviens de ma conversation avec Lola pour comprendre ce qui s'était passé et de celle qui suivit sur l'art et la manière de dire les choses avec douceur et empathie pour éviter que ce genre de choses ne se reproduisent, je me souviens du soulagement lorsque la Police a retrouvé le petit garçon qui avait volé une pomme dans un centre commercial voisin car il était affamé et que ce petit larcin avait permis de rassurer toute une ville...
Et je me souviens surtout parfaitement du lendemain matin dans la salle de bain lorsque je l'ai vu pour la première fois... Mon premier cheveu blanc !!!
Alors bien sûr j'ai d'abord été surprise... Puis un peu horrifiée je dois bien le reconnaître... Comment était-ce possible, je n'étais même pas vieille ???
32 ans, ce n'est pas assez vieux pour avoir des cheveux blancs!!! Puis la psychologie humaine fait que dans des situations critiques, il faut un coupable ! Si ce n'était pas mon grand âge, ni moi, cela ne pouvait être que le stress causé la veille par la soirée de folie!!! D'ailleurs tous les magazines féminins le disent, le stress donne des cheveux blancs... Le responsable de mon premier cheveux Blanc avait donc 10 ans et s'appelait Adam !

Alors quoi ? Qu'est-ce que j'ai fait ???
Ce que je pense une très grande partie des femmes font lors de cette première rencontre...
J'ai d'abord vérifié que personne n'avait été témoin de mon horrible découverte matinale, j'ai refermé la porte de la salle de bain, suis retournée devant le miroir et l'ai arraché sans la moindre pitié, l'enfouissant dans le fond de la poubelle pour dissimuler toute preuve comprométante et j'en suis ressortie comme si rien ne s'était passé... ou presque.

Les jours qui suivirent je passais un peu plus de temps dans la salle de bain pour m'assurer qu'il était bien la seule regrettable séquelle de cette terrible soirée et qu'aucun autre n'avait décidé de s'installer discrètement...
Fort heureusement, mes recherches furent vaines et jours après jours, semaines après semaines...

Mais fatalement ce qui devait arriver, arriva. Un jour alors que j'avais totalement baissée ma garde je fus interpellée par un reflet clair dans le miroir... J'ai marqué un temps d'arrêt, ai bougé vaguement la tête et observé: aucun doute possible ! Un autre était apparu.
Le pauvre  a subit le même sort que le premier...
Il ne furent pas que deux à finir au fin fond de la petite poubelle noire...
Les 10 qui suivirent dans les mois à venir eurent le même destin tragique!
Chaque cheveu retrouvé rajoutait une petite dose de contrariété, alimentant le moulin de ma réflexion... Je n'allais quand même pas continuer à m'arracher les cheveux à chaque fois que j'en voyais un, d'autant qu'ils seraient fatalement de plus en plus nombreux, je devais absolument trouver une solution...

C'est donc très fière de moi que j'ai décidé d'arrêter de m'épiler sélectivement la tête et que j'en suis arrivée à la solution que beaucoup de femmes également adoptent : la coloration !!!
Alors je n'avais pas envie de faire des couleurs et de devenir esclave des repousses et des racines, j'ai donc demandé à mon coiffeur de me faire des mèches multi teintes dont certaines blondes très clair,  de sorte que les cheveux blancs soient comme camouflés dans la masse de cheveux multicolores ! Ainsi j'avais quelques mois devant mois avant de devoir retourner rajouter quelques mèches de plus, la solution me semblait, la plus discrète, la plus économique bref : parfaite pour moi !
Et cela a marché ! Je prenais maintenant un malin plaisir à chercher mes cheveux blancs dans le miroir et était très fière de ne plus les retrouver !
8 mois plus tard je rajoutais quelques mèches comme prévu et j'ai passé 18 mois sans trop me préoccuper de l'invasion latente que je ne voyais plus mais qui n'en était pas moins réelle.

Le souci c'est que les mèches, les couleurs , le coiffeur, toussa toussa.... Et bien ce n'est pas vraiment moi !!! Et puis c'est un budget considérable, même si c'est moindre que les colorations mensuelles, cela n'en reste pas moins une certaine somme que je ne souhaitais plus dépenser ainsi. Je n'ai donc pas revu mon coiffeur et fatalement, quelques mois plus tard devinez qui s'invitait désormais dans la salle de bain avec moi ? ( Bon en vrai ils étaient partout avec moi, mais je ne les voyais que dans la salle de bain !)

J'ai appris la patience, la tolérance... Et chaque fois que j'en acceptais un de plus, il en surgissait de nouveaux... Une lutte perdue d'avance j'en avais bien conscience !

Je n'avais plus le choix, refusant les solutions chimiques il ne me restait plus qu'une seule option :
Travailler sur moi et sympathiser avec l'ennemi !!! Mais comment ???
Comment accepter ces preuves irréfutables que le temps passe et m'échappe???
Comment éprouver ne serait-ce que de l'indifférence faute de pouvoir ressentir de la sympathie?
Il m'allait falloir effectuer un gros, très gros travail sur moi-même et le défi était de taille !!!

Pendant cette période de réflexion et d'introspection, la Vie m'a filé un petit coup de pouce l'air de rien...
L'un de mes amis facebook a partagé un lien que j'avais laissé filé dans mon fil d'actu et qui s'est curieusement représenté à moi jusqu'à ce que j'y jette enfin un oeil, intriguée de ces curieuses répétitions...
L'histoire en question sur le lien la voilà :

"Pensant faire plaisir à son mari, une femme est allée chez un photographe pour obtenir des photos d'elle en petite tenue et quelques jours plus tard la photographe en question a reçu un message inattendu de la part du mari de cette femme. Un message touchant, juste et intelligent."

Un message qui a changé à jamais ma vie, mon regard sur mon corps, et sur celui de mon petit mari aussi...

"Avant toute chose, sachez que la photographe avait accepté la requête de sa cliente et avait photoshopé ses petits défauts liés à l'âge ou à la maternité. Objectif : Que sa cliente soit parfaite aux yeux de son mari... Sauf que le mari n'a pas vraiment été ébloui ! Il a surtout été bouleversé par ces images qui l'ont questionné. C'est précisément ce qu'il a tenu à expliqué à la photographe dans cette lettre :

"Bonjour Victoria, 

Je suis le mari de... (La photographe ne mentionne pas les noms). Je vous écris car j'ai récemment reçu un album avec les photos que vous avez prises de ma femme. Nous sommes ensemble depuis nos 18 ans et nous avons deux beaux enfants. Au fil des années nous avons eu beaucoup de hauts et de bas. Je pense que ma femme a fait ces photos pour pimenter un peu les choses. Elle se plaint parfois que je ne la trouve pas assez séduisante et dit qu'elle ne pourrait pas me blâmer si je trouvais quelqu'un de plus jeune.
Quand j'ai ouvert l'album qu'elle m'a offert, mon coeur s'est serré. Ces photos sont très belles et vous êtes manifestement une photographe de talent ... Mais ce n'est pas ma femme. Vous avez fait disparaître chacun de ses "défauts". Même si je suis sûr que c'est elle qui vous a demandé de le faire, vous avez enlevé tout ce qui fait notre vie.
Lorsque vous enlevez ses vergetures, vous enlevez le souvenir de ses grossesses et de nos enfants.
Lorsque vous enlevez ses rides, vous enlevez deux décénies de rires et de soucis.
Lorsque vous enlevez sa cellulite, vous enlevez son amour pour la cuisine et tous ces petits plats que nous avons partagés.

Je ne vous dis pas cela pour vous faire sentir mal. Vous avez juste fait votre travail. Je vous écrit pour vous remercier. En voyant ces images, je me suis rendu compte que je ne disais pas assez à ma femme à quel point je l'aime et je l'adore comme elle est. Elle l'entend si rarement qu'elle pensait que ces photos photoshopées étaient ce que je souhaitais.  Je dois faire mieux pour le reste de notre vie et la célébrer dans toute son imperfection. Merci pour le rappel".

Cette lettre m'a totalement retourné la tête et m'a permis de faire ce que je fais pourtant dans toutes les épreuves que la Vie met sur mon chemin : à savoir chercher le positif qui se cache dans toute épreuve.
Vieillir est pourtant une épreuve... Il me manquait un déclic...
Et comme si j'avais besoin d'une confirmation je trouvais dans la suite de mon fil d'actualité cette image qui finit de me persuader...


Effectivement... Vu sous cet angle...
Depuis ce jour, je regarde mon corps avec bienveillance et tolérance...
J'ai depuis découvert le dicton qui dit que "pour chaque femme qui pleure sur ses vergetures il y a une femme qui aurait tant aimé en avoir..." alors quand je regarde mon ventre à jamais marqué, la déception et l'amertume ont laissé place à la gratitude pour ces 3 merveilleux enfants que mon corps à abrité et fait grandir...
Lorsque je regarde mes rides ou la peau de mes mains qui n'est plus aussi lisse et ferme que lorsque nous nous sommes rencontrés Christophe et moi je me dis que c'est parce que cela fera 20 ans cet été que nous avons la chance de nous réveiller tous les matins l'un à côté de l'autre, 20 années de rires, de larmes aussi parfois, 20 années de travail pour construire et rénover notre maison... Et qu'il serait bien indécent de ma part de nier la chance insolente que nous avons... Alors si ces quelques rides en sont le prix à payer, je ne peux que reconnaître que l'addition est finalement bien légère !
Lorsque je regarde mes cheveux blancs qui se font encore un petit peu plus nombreux, que je ne cache plus... il m'arrive même de rêver au jour où ma chevelure sera entièrement blanche dans l'espoir que ceux de Christophe le soient aussi à mes coté, que mes enfants soient tous en pleine forme, peut-être même poivre et sel eux aussi déjà et que nous aurons alors une grande et magnifique famille... Et je me surprends à sourire, et à murmurer ... "Merci"...