samedi 14 février 2015

Donner beaucoup quand on a peu... c'est possible !

Je reprend ce soir mon clavier exutoire dans l'espoir de m'alléger le coeur...

Je vous avais déjà parlé il y a quelques mois de mes premières rencontres avec les Roms d'un bidonville de la métropole Lilloise...
Depuis j'y suis allée pas loin une dizaine de fois... apporter des jouets, des matériaux et des outils pour le bricolage, des vêtements aussi souvent...

Et puis il y a deux ou trois mois, j'ai fait la connaissance de Maria, une jeune femme Rom également qui faisait la manche à la sortie du supermarché de mon village avec un magnifique chien loup...

De jour en jour j'ai fait sa connaissance, j'ai appris qu'elle résidait également au camp Loos, qu'elle était la maman d'un petit garçon de 4 ans mais qu'elle ne voulait pas l'emmener faire la manche, elle m'a parlé de son pays ou la vie est plus difficile encore là-bas que leur survie d'ici...


Chaque fois que je faisais mes courses, elle me confiait à l'entrée ce dont elle avait besoin ce jour-là...
Parfois c'était du pain, parfois des fruits, parfois des biscuits pour son fils ou une boîte pour son chien...  Un jour elle m'a demandé avec la plus grande humilité une paire de chaussures car la sienne était éventrée et comme elle faisait la même taille que Lola elle lui a offert une seconde vie à sa paire de basket devenue trop petite.

Une autre fois elle m'a demandé toute confuse un pot de Nutella, sitôt demandé, j'ai lu dans son regard le regret d'avoir parlé trop vite... pensant sous doute abuser car il ne s'agissait pas là d'un produit de première nécessité.
Et je me suis dit que sa vie devait être déjà bien dure, alors que si un peu de pâte à tartiner pouvait lui adoucir un peu les journées et bien soit! Ce jour là ce fut un pot de pâte à tartiner (Fuck le boycott de l'huile de palme ce jour là...) Et vous auriez vu ses yeux quand elle m'a vu ressortir avec ce gros pot accompagné d'une baguette encore tiède... Nous n'étions que mi décembre mais pour elle ce jour là c'était Noël ! :)

Et puis en début d'année, elle a disparu.
J'avais préparé un sac de vêtements chauds pour elle que je gardais en permanence dans mon coffre pour le jour où je la reverrai mais après l'avoir croisée chaque jour pendant plusieurs semaines, les jours d'absences se sont enchaînés se transformant en quinzaine... Je suis tombée malade me clouant au lit 6 jours de plus...
Presque 1 mois s'était écoulé depuis notre dernière entrevue, et c'est avec un immense soulagement que je l'ai aperçue ce soir en allant chercher mes légumes et un gâteau pour le dessert...

Aujourd'hui en quelques mots elle a transformé le petit gâteau de notre dessert en savon et shampoing  pour sa famille et son chien ( Eh! Budget serré oblige!)... et puis nous avons parlé un petit peu... Ce n'est pas toujours simple de se comprendre car même si de semaine en semaine son vocabulaire s'enrichit, elle maîtrise mal notre langue mais ses traits, sa voix, tout son corps semblait faible.
Elle nous a parlé de la grippe, du grand froid...
Et quand je lui ai demandé ce que nous pouvions faire de plus pour elle, pour l'aider elle m'a demandé juste des couvertures... Pas d'argent, elle n'en a même jamais demandé d'ailleurs (Elle ne refuse pas l'argent donné mais 90% des dons qu'elle reçoit sont en denrées alimentaires qui lui permettent de nourrir sa famille).
Elle est revenue 3 fois sur des couvertures... Avec la même lueur d'espoir dans le regard que la fois où elle m'avait demandé de la pâte à tartiner.

Malheureusement, je n'ai pas de couvertures. Toutes celles que j'avais déjà en trop, j'en avais déjà fait don au camp. Mais cela, je n'ai pas pu le lui dire, je n'ai pas su. Je ne me voyais pas lui dire que je n'en avais pas. C'est faux, j'en ai dans mon lit, je dors au chaud...moi. :(
Mais je n'en ai plus en trop, alors je me suis tue et je suis rentrée chez moi la boule au ventre.

Une boule qui grossissait à mesure que mon sentiment d'impuissance prenait de l'ampleur...
C'est terrible d'assister à toute cette détresse et de ne rien pouvoir faire... D'avoir envie de faire bouger les choses mais de ne pas en avoir les moyens !!!

Je suis rentrée chez moi bien au chaud et je l'ai laissée là, malade sur le trottoir froid avec une seule obsession : trouver des couvertures!!!
Je suis à découvert le 10 du mois alors je ne me vois pas aller en acheter tout un stock ni même une seule en soldes...  Je n'ai pas de couvertures, je n'ai pas d'argent, mais je rentre bien au chaud dans un quartier plutôt douillet à coté de la rudesse de sa vie à elle... Quelle horreur !

Mon quartier !!! Mais bien sûr ! Je la tenais ma solution!!!

Moi je n'avais pas de couverture... Mais j'avais plein de voisins qui eux ne les avaient pas encore données et qui ne devaient pas savoir quoi en faire enfin c'est ce que j'espérais.

Alors j'ai fait du porte à porte, chez ceux que je démarche d'ordinaire pour organiser la fête des voisins ou pour pétitionner ... Tous ces voisins que je croise chaque semaine et qu'il ne me restait plus qu'à convaincre!

J'ai commencé mon tour par les proches et ai récolté des promesses de dizaines de couvertures qu'ils allaient donner dans les jours à venir parce qu'ils devaient tout trier, rouvrir des vieilles armoires, monter au grenier...  Ils m'ont même proposés des manteaux chauds, des bonnets, des écharpes... Après tout pourquoi se limiter aux couvertures?
Pourquoi se limiter aux proches voisins ?
Eux étaient ravis de se débarrasser et moi j'en avais les larmes aux yeux de tout ce que j'allais pouvoir apporter !
Alors j'ai continué mon tour pendant plus d'une heure... et j'y retournerai!
Lola en profitera pour relayer la collecte à son lycée cette semaine histoire de grossir encore les sacs;)

Je donnerai quelques couvertures à Maria et sa famille et tout le reste que nous collecterons ira au samu-social de notre secteur qui manque chaque hiver de budget, que nous connaissons bien et qui sait réellement où se trouvent les besoins!

Et c'est le coeur plus léger que je me coucherai ce soir...
Le coeur allégé de voir que même quand on a pas grand chose, et bien on peut quand même donner beaucoup !!! Et que c'est à la portée de tous même si pendant quelques instants j'ai cru le contraire...
Même si je me suis sentie impuissante,  Même si j'ai pensé que je n'avais pas le pouvoir de changer les choses... J'ai fini par comprendre que si, je l'avais ce pouvoir !!!
Je ne changerais pas le monde à moi toute seule, mais n'ai-je pas écrit tout en haut de mon blog qu'il n'y a pas de petits gestes si nous sommes des millions à les faire ?
Des millions ... je suis peut-être optimiste... des milliers aussi... Mais des dizaines, centaines peut-être... Vous imaginez le bien-être et le bonheur répandu ??? Ca vaut le coup d'essayer non ?

2 commentaires:

Mylène a dit…

Super Sophie, ce texte... émouvant, on aimerai faire pareil. Je ne sais pas aller vers les autres, j'aimerai que tu sois là à me tenir la main, pour m'accompagner et réussir à faire ce que tu fais! Tu es vraiment exceptionnelle et ce que tu fais à ton échelle est merveilleux. Je prends une leçon de vie à chacun de tes articles :)
Merci à toi!

Fofie a dit…

Ca commence par un bonjour qui vient du coeur, un sourire quelques mots empreint de bienveillance...
Quand nos mots sont teintés d'amour, l'accueil est toujours au rendez-vous... Et même si au début on se montre ou juste on se sent maladroit, la maladresse vaut mieux que le silence ou l'indifférence...
Vas-y, lances-toi ! :)
Tu verras comme c'est bon le partage... comme cela sème le bonheur... et on se sent tellement mieux après... :)
Tu n'as pas besoin que je sois là, si l'envie est là, écoute ton coeur et je suis certaines que tu seras à la hauteur :)
Bien à toi...
Fofie